jeudi 12 juillet 2012

Spleen, Quand le ciel bas et lourd ..., de Charles Baudelaire

Quand La bibliothèque de Quichottine a l'humeur baudelairienne et que lesCROQUEURS DE MOTS se sont mis en vacances des jeudis en poésie, et même si nous ne sommes pas le premier du mois, j'avais envie d'offrir à la Toile, ce poème de Baudelaire, couleur du temps de ces jours-ci du moins de ce côté, parce que tous les jours devraient être Le jour du lien.


LXII

SPLEEN

Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle
Sur l’esprit gémissant en proie aux longs ennuis,
Et que de l’horizon embrassant tout le cercle
Il nous fait un jour noir plus triste que les nuits ;

Quand la terre est changée en un cachot humide,
Où l’Espérance, comme une chauve-souris,
S’en va battant les murs de son aile timide,
Et se cognant la tête à des plafonds pourris ;

Quand la pluie étalant ses immenses traînées
D’une vaste prison imite les barreaux,
Et qu’un peuple muet d’horribles araignées
Vient tendre ses filets au fond de nos cerveaux,

Des cloches tout-à-coup sautent avec furie
Et lancent vers le ciel un affreux hurlement,
Ainsi que des esprits errants et sans patrie
Qui se mettent à geindre opiniâtrément.

— Et d’anciens corbillards, sans tambours ni musique,
Défilent lentement dans mon âme ; et, l’Espoir
Pleurant comme un vaincu, l’Angoisse despotique
Sur mon crâne incliné plante son drapeau noir.
Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, 1857

colza en fleurs dans le Vexin 26 avril 2012, 18h32